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91,8 % de réussite au bac : une hausse continue qui ne convainc pas Elisabeth Borne Alors que le taux de réussite au baccalauréat atteint 91,8 % en 2025, en progression de 0,4 point par rapport à 2024 — une dynamique amorcée depuis la crise du Covid — la ministre de l’Éducation nationale, Elisabeth Borne, se démarque par son scepticisme. Invitée sur Radio J le 13 juillet, elle a rappelé que « On ne donne pas le bac à tout le monde et on ne doit pas donner le bac à tout le monde. » et déploré la diffusion de consignes de correction jugées « trop bienveillantes », tout en précisant qu’elles n’émanent pas du ministère de l’éducation rue de Grenelle.
Invitée de Radio J le 13 juillet 2025, Elisabeth Borne a remis une pièce dans la machine à controverses. À la question du journaliste Frédéric Haziza — « Est-ce que le fait que pratiquement tout le monde obtienne le bac est une bonne chose ? » — la ministre de l’Éducation nationale a répondu sans détour :
« On ne donne pas le bac à tout le monde et on ne doit pas le donner à tout le monde. »
Une phrase qui, derrière son apparente évidence, rouvre une faille bien connue du système éducatif français : celle du niveau réel du baccalauréat. Avec un taux de réussite flirtant avec les 92 % en 2025, dans la continuité post-Covid, la question n’est plus seulement de savoir si les élèves réussissent… mais dans quelles conditions.
La « bienveillance excessive » une excuse pour durcir la notation ?
Au cœur de la prise de parole de la ministre : l’existence de consignes de correction jugées trop indulgentes, évoquées dans la presse. Si ces directives ne sont pas issues du ministère de l’Éducation nationale — « pas de la rue de Grenelle », selon ses mots — elles seraient néanmoins symptomatiques d’une tendance générale à l’assouplissement.
Elisabeth Borne promet donc une réponse ferme : une circulaire sera envoyée à la rentrée aux correcteurs pour réaffirmer les exigences attendues, et enrayer tout soupçon sur la validité du diplôme.
« J’adresserai une instruction à la rentrée sur les consignes qui sont données aux correcteurs. C’est très important qu’on n’ait pas une suspicion sur le niveau du bac. »
Plus de rigueur, mais à quel prix ?
À mesure que la ministre brandit l’aigle de l’exigence, une autre inquiétude surgit : Le renforcement des critères de correction ne risque-t-il pas d’ajouter une pression supplémentaire sur des élèves déjà soumis à rude épreuve ? L’examen national est-il en train de devenir plus une épreuve de sélection qu’une validation de connaissances ?
Et surtout, la difficulté croissante est-elle une solution en soi ? Ou un pansement mal ajusté sur une fracture plus profonde ?
Refonder plutôt que retoucher ?
Car au-delà des critères de correction, c’est peut-être le socle même de l’Éducation nationale qui mérite d’être revisité. Faut-il continuer à réajuster les vis d’un système hérité du XIXe siècle à coups de circulaires ? Ou accepter, enfin, de repartir d’une feuille blanche ?
Dans l’interview CARRIÈRES #01 avec Frédéric Deleporte un professeur de SES, nous avions abordé cette idée iconoclaste mais nécessaire : refonder l’Éducation nationale en profondeur. Mais par où commencer ? Avec qui ? Et surtout, avec quelle vision ?
Peut-on encore bâtir du neuf avec du vieux ? Ou faut-il en finir avec les réformes à moitié, qui déplacent les meubles sans toucher aux fondations ?
Une école bloquée dans le passé qui doit éduquer un monde qui prévoit déjà son avenir.
Dans une société en constante accélération — numérique, climatique, sociale — l’éducation reste étonnamment figée. Les comportements changent, les attentes évoluent, les métiers se transforment à une vitesse vertigineuse… mais les programmes scolaires, eux, peinent à suivre.
Est-ce vraiment en serrant la vis du baccalauréat que l’on redonnera du sens à l’école ? Ou est-ce plutôt en ré-interrogeant profondément le rôle, les méthodes et la finalité de l’institution ?
Le baccalauréat, baromètre d’un malaise plus large.
La polémique lancée par Elisabeth Borne ne se limite pas à une querelle de notes. Elle révèle un malaise plus large : celui d’une école en décalage avec son époque, où l’on débat encore de chiffres de réussite pendant que la jeunesse réclame du sens.
Redonner de la valeur au bac, oui.
Mais cela suppose de redonner une boussole à toute une génération.
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